La rétrospective, une pratique essentiellement individuelle

Je dois avouer un truc : malgré mon enthousiasme pour les méthodes agiles, j'ai longtemps détesté la pratique des rétrospectives.

Les rétros, c'est le moment où tu parles (un peu) de ce qui s'est bien passé les dernières semaines et (beaucoup) de ce qu'il faudrait améliorer ou modifier. Et, la fois suivante, tu retrouves souvent les mêmes choses car rien n'a vraiment bougé entre temps.

Et puis un jour j'ai eu un déclic.

C'était lors de l'Agile Tour Toulouse 2015. J'ai assisté à un atelier d'animation de retrospective "orienté solutions" proposé par Frédéric Duffau.

Un des mécanismes pour se positionner dans le sens d'une solution à apporter à un problème c'est

  • évaluer la situation actuelle sur une échelle de 0 à 10 où 10 est la situation idéale que l'on voudrait avoir et 0 l'absence complète de solution
  • se poser une seule question : que faire concrètement pour avancer d'un cran ? Par exemple, passer à 4 si on est actuellement à 3.

Faire commencer l'échelle à zéro permet de se rendre compte que la situation n'est, en général, pas si catastrophique. Se focaliser sur le cran suivant permet de penser petits pas. Aller immédiatement à 10 serait probablement impossible.

Mais ce que j'étais loin d'anticiper en expérimentant ce mécanisme, c'est à quel point cette échelle est individuelle. Pour la même situation, le même problème exprimé, deux personnes de la même équipe ne vont pas forcément se positionner au même endroit sur l'échelle.

Pire, même si elles se positionnent au même endroit, le passage au cran suivant ne signifiera pas forcément la même chose et donc pas les mêmes efforts à fournir.

A partir de là, j'ai commencé à considérer les rétrospectives comme un rendez-vous individuel avec moi-même.

Il faut, bien sûr, échanger les points de vue pour comprendre une situation donnée, pour découvrir des problèmes insoupçonnés, pour avoir des idées sur comment avancer, etc. Mais, au bout de tout ça, la solution et la façon d'y arriver restent, j'en suis convaincu, des questions individuelles.

Les listes d'actions collectives au sortir d'une rétrospective, je n'y crois que très moyennement. Tout le monde est plein de bonne volonté mais le quotidien nous rattrape toujours. Ça sera compliqué de prioriser une action collective si elle n'est pas partagée avec un fort sentiment d'urgence. Le petit pas individuel coûte moins cher que le petit pas collectif.

De plus, si l'action qui n'est pas menée et revient à la rétrospective suivante, la frustration s'installera, avec le risque de considérer que la faute vient des autres.

Bref, pour paraphraser un célèbre discours, quand il s'agit de conclure une rétrospective, ne demandez pas ce que votre équipe ou votre organisation peut faire pour vous. Demandez ce que vous pouvez faire pour votre équipe ou votre organisation.


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